A presque 60 ans, je vis un retour de la boulimie vomitive depuis plus de deux ans, après quinze ans d’accalmie. C’est seulement depuis quelques mois que j’ai enfin accepté le retour de ce trouble et demandé une aide psychologique.

Etant normo pondérale, ma boulimie ne se voit pas. Je m’efforce aussi de ne rien laisser paraître. Souriante et serviable en famille et au travail, je mène mon combat dans la plus grande discrétion, ce qui entraîne souffrance et solitude.

Je suis « tombée » dans les TCA à 20 ans, en 1980, alors que le monde médical ne s’y intéressait absolument pas. Après une période d’anorexie, la boulimie (vomitive ou pas) s’est installée pour de nombreuses années. J’ai fait une première longue thérapie qui m’a stabilisée, sans toutefois éliminer définitivement mes préoccupations alimentaires.

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A 30 ans je me suis mariée. Nous avons eu un enfant et vécu sur plusieurs continents, parfois dans des conditions difficiles. J’ai affronté et apprivoisé des réalités culturelles très différentes de la mienne et côtoyé des gens de tous horizons. A notre retour, je croyais que je m’installerai dans un quotidien apaisé, forte des expériences vécues.

Or, les symptômes sont réapparus et je l’ai ressenti d’abord comme un choc et une profonde humiliation. Pendant de longs mois je me suis chaque fois répété que la crise du jour était la dernière, que demain ça ira mieux. De crise en crise, j’ai rechuté sérieusement.

 

 

Depuis quelques mois je vois un psychologue. Même si je trouve que le changement est trop lent à s’installer, je vais déjà mieux. Désormais j’accepte ma situation et veux remonter la pente avec modestie et patience. Le travail par la parole est long, je suis cependant certaine d’être sur le bon chemin.

Les activités qui m’aident et me nourrissent sont le dessin (parfois les yeux fermés ou de l’autre main, comme ça il n’y a pas d’attente ni de déception), le mouvement (gym, aquagym, randonnées, yoga, patinage en hiver), la pleine conscience (apprentissage de chaque instant). Dans la mesure du possible, je m’attache à privilégier le ressenti intérieur face aux normes et stimulations extérieures, ce qui est très apaisant.

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Ce faisant, il m’est aussi important de rester ouverte aux autres et au monde. Mes soucis très personnels ne doivent pas me faire oublier d’autres urgences, climatiques notamment, et de m’engager pour celles-ci. Je m’efforce aussi d’être reconnaissante pour tout ce que j’ai et qui va bien: je vis dans un pays en paix, j’ai accès à l’eau et l’électricité, un toit sur la tête, etc. Ce qui semble aller de soi pour nous, n’est de loin pas la réalité de tous.

Voilà. Je me bats donc à toutes sortes de niveaux, avec de bons et de mauvais jours. La vie quoi!

J’ai découvert l’application Feeleat il y a quelques semaines et j’en suis ravie. Elle atténue mon sentiment d’isolement face à mes TCA et je souhaite remercier ici toute l’équipe qui porte ce projet.

Vous pouvez retrouver Martine sur son compte Instagram : martinette_dulac