Les Français restent très attachés à un modèle alimentaire traditionnel, fondé sur la convivialité et la commensalité (le fait de partager des repas avec d’autres), privilégiant la diversité et des repas réguliers, en trois services (entrée, plat, dessert). Mais, loin d’être figées, leurs pratiques quotidiennes se transforment, avec la déstructuration des rythmes de travail et l’arrivée d’une nouvelle génération hyper connectée, nomade et attentive aux évolutions de la société.
Cette génération « Z », née après 1995, casse le modèle des « trois repas structurés » par jour, préférant le « snacking » : l’entrée est zappée (on ne la retrouve que dans 17 % de leurs repas), ils consomment moins de fromage (seulement dans 30 % de leurs repas) mais continuent à apprécier les desserts (67 %). Le repas tend très souvent vers un apéritif dînatoire.
Autre résultat surprenant : le hors domicile représente près d’un tiers des occasions de consommation et les Z sont plus susceptibles que la génération précédente de prendre une collation entre les repas (74 % pour les Z contre 66 % pour les Y) et recherchent des solutions « prêtes à consommer » adaptées à leur mode de vie nomade (58 % pour les Z contre 40 % pour les Y). Les périodes de confinement et de couvre-feu ont accentué la tendance, puisque 73 % des jeunes admettent consommer plus de snacks depuis le début de la crise sanitaire.
Entre « snacking » et « healthy food »
En dehors du foyer, les jeunes déclarent aimer manger au fast-food alors que les adultes issus des générations précédentes évoquent plus facilement les lieux de restauration classique. Avec une culture gastronomique aussi ancrée, il peut paraître surprenant que la France soit le deuxième pays du fast-food après les États-Unis. Mais il faut rappeler que le fast-food a une fonction sociale incontestable, procurant des opportunités de rencontre et de socialisation, avec des offres à des prix modérés.
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Mais, au-delà de cette attirance pour les produits transformés, la jeune génération est aussi une génération engagée. Elle est donc touchée par les discours autour des circuits courts, des produits frais. Une part d’elle se laisse tenter par les nouveaux régimes alimentaires « sans » (sans gluten, sans sucres ajoutés, sans nitrite, sans additifs, sans gluten…) ou des régimes flexitariens (en évitant la viande), pour sauver planète.
Pour 95 % des jeunes, être en bonne santé passe par une alimentation saine. Surnommée « génération salade » aux États-Unis, une frange de la population des jeunes, représentant 30 % de la population, tournerait le dos au traditionnel burger et ses fast-foods pour préconiser des sandwichs « maison » et des snacks de qualité. Le bio devient une tendance de fond parmi les jeunes. D’après une étude menée par l’Agence Bio les jeunes y sont attachés pour des raisons éthiques et sociales (37 %) et de bien-être animal (32 %).
Contraints de passer plus de temps chez eux durant les périodes de confinement, les jeunes se sont (re)mis à la cuisine, mais de façon facilitée et partagée. Une étude parmi les 18-24 ans estime que c’est l’apéritif préparé maison qui l’emporte devant les apéritifs achetés (37 % contre 15 %). Près de 50 % des jeunes ont participé à un apéritif virtuel pendant la période de confinement (contre 30 % de l’ensemble des Français) et ils sont plus d’un sur deux (57 %) à avoir l’intention de poursuivre cette pratique qui pourrait bien s’ancrer dans leur quotidien.
Cette volonté d’apprendre à cuisiner ensemble passe par l’achat de kits à cuisiner, de paniers « découverte » conçus pour se faire à manger soi-même à la maison, ou encore de cours collectifs en ligne (comme la plate-forme de mise en relation au service des expériences culinaires, Kweezine).
L’essor du flexitarisme
Si le régime sans viande, qui reste marginal en France, se développe dans l’ensemble de la population, ce sont les jeunes qui s’y convertissent davantage. D’après une enquête réalisée par FranceAgriMer en 2018, 12 % des 18-23 ans déclarent être végétariens, contre 2 % des plus de 55 ans – pour 5,2 % des Français au total ; ils étaient 0,7 % en 1998, selon une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc).
Mais c’est surtout l’adhésion au principe de réduction de la consommation de viande, connu sur le terme de « flexitarisme », qui se répand massivement chez les jeunes. Selon cette même enquête, 44 % des 18-24 ans se disent prêts à réduire leur consommation de viande, un chiffre deux fois plus élevé que chez les plus de 55 ans. Mise en pratique d’un engagement contre le réchauffement climatique, le flexitarisme est un marqueur pour une jeunesse de plus en plus sensible à l’environnement.C’est quoi le flexitarisme ? (Brut, 2018).
Même s’il est générationnel, cet essor du flexitarisme est aussi socialement marqué : parmi les jeunes, les plus aisés et urbains tendent davantage à franchir le cap que les autres. Les étudiants, dont les parents sont cadres ou exercent une profession libérale, sont ceux qui ont le plus diminué leur consommation de viande. Ce qui peut expliquer pourquoi le flexitarisme est particulièrement présent au sein des étudiants, parmi lesquels 73 % des étudiants déclarent avoir déjà diminué leur consommation de viande et de poisson ou souhaitent le faire, tandis que 11 % sont déjà passés à un régime végétarien.
Le flexitarisme, le végétarisme, le véganisme… toutes ces nouvelles pratiques alimentaires, qui innovent et rompent avec le conformisme alimentaire des parents, ne sont qu’une facette d’un engagement plus large des jeunes au quotidien, pour le développement durable de la planète.
Article initialement paru dans The Conversation France
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